samedi 6 février 2016

Dans la solitude des champs de coton de Bernard -Marie Koltès

Fréquents sont les spectacles qui satisfont la galerie, exceptionnels ceux qui envoûtent. La mise en scène par Roland Auzet de cette pièce montée à plusieurs reprises par Patrice Chéreau est de celle dont la beauté foudroie. Le face à face d'un dealer et de son client est, pour la première fois, interprété par deux comédiennes : Anne Alvaro et Audrey Bonnet qui semblent avoir été touchées par les mots de Koltès comme certains, dit-on, l'auraient été par la grâce. Les deux personnages tout du long sondent les abimes du désir et ce faisant tentent de forcer les ténèbres qui les entourent et les hantent. S'il ne prétend pas découvrir le sens ultime des choses, Koltès, qui manie la langue comme d'autres un instrument de musique, sait d'expérience que c'est en l'autre, l'objet de désir, qu'on tente de trouver le Graal. Si chez Chéreau les personnages s'empoignaient, se rudoyaient, voyaient dans le corps de l'autre un appât, il en est autrement ici où le dealer est pour le client et le client pour le dealer un mystère que, malgré la profusion de mots, l'on ne peut élucider. Emporté par sa verve, Koltès en arrive même à faire dire à l'un(e) des protagoniste que l'amitié, d'ordinaire si glorifiée, ne peut qu'être radine. Le metteur en scène explique dans le dossier de presse que "des casques pour chacun du public sont proposés pour entrer dans l'intime des mots, de la situation et des corps des actrices". Ce qui au départ peut éveiller de la méfiance mai se révèle d'une parfaite justesse. Pour donner un surcroit de tension à cette singulière danse de mort, Roland Auzet à fait appel au chorégraphe Thierry Thieû Niang dont il faut souligner le considérable apport. Un coup de chapeau enfin au Théâtre des Célestins de Lyon qui a produit ce spectacle d'une force si peu commune. Jusqu'au 20 février Théâtre des Bouffes du Nord tel 01 46 07 34 50

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