dimanche 16 novembre 2014

La mission de Heiner Müller

A une époque où les illusions révolutionnaires étaient amplement partagées, les pièces d'Heiner Müller étaient fréquemment montées. Ce qui à présent qu'elles sont en déroute n'est évidement plus le cas. Peut être le sentiment qu'éprouvent aujourd'hui tant d'hommes et de femmes d'être réduits en esclavage par l'entreprise dans laquelle ils bossent ou tout simplement par le régime néo-libéral lequel considère les individus comme du menu fretin provoque-t-il un regain d'intérêt pour cet auteur majeur. La Mission s'ouvre sur le spectacle d'un homme (Debuisson)à l'élocution pâteuse. Il fut autrefois avec deux autres citoyens envoyés par la Convention en Matinique pour y faire disparaître l'esclavage. Que Napoléon a rétabli quelques années plus tard. Ses compagnons tués, Debuisson dialogue avec leurs ombres. Et avec un ange paré de la beauté d'une apparition. Les morts n'ont pas dit leurs derniers mots. L'un, descendant de déportés africains, en est arrivé à considérer que la "patrie des esclaves est le soulèvement", l'autre donne libre cours à sa rancoeur. On est propulsé dans un rêve lequel n'a que faire de la chronologie. Comme grand nombre de metteurs en scène allemands,Michael Thalheimer a une prédilection pour le grotesque inquiétant. Son spectacle est zébré de séquences burlesques. Ainsi celle où s'affrontent les chefs de file portant perruque extravagante de la révolution française.Un régal mais auquel certains trouveront à redire tant le texte est dense. Heiner Müller écrit par fragments ce qui fait la richesse de son propos mais le rend parfois obscur. Un décor signé Olaf Altman et le jeu d'une qualité hors pairs de Charlie Nelson, Jean-Baptiste Anoumon, Claude Duparfait, Noémie Develay-Ressiguier et Stefan Konarske contribuent à ce que ce spectacle d'accès peu aisé reste dans le souvenir. Jusqu'au 30 novembre La colline-théâtre national tel 01 42 62 52 52

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