mardi 29 mai 2012

Promenade au jardin des délices et des dédoublements par Joshka Schidlow

Vache sacrée de la littérature, Colette se lança dans l'écriture de "Chéri "(roman qu'elle transforma en pièce de théâtre) après sa rupture avec le fils de celui qui partageait sa vie. L'épanchement n'étant guerre sa tasse de thé, elle relève d'une pointe d'humour les moments où Léa, la femme vieillissante restée sur le carreau aurait tendance à geindre. Jean-Gabriel, un de ses nombreux ancien amant auquel la lie une inaltérable tendresse,  se fait un devoir mais aussi un plaisir de venir la dérider. Comme il fait volontiers son facétieux, se pique par exemple d'être un as de la couture et du crochet, il arrive quelquefois à ses fins.

Lorsque le comédien et metteur en scène Alexandre Zambeaux me proposa d'endosser le rôle de ce vieux beau à l'humour excentrique je n'avais jamais posé le pied sur une scène. J'acceptai néanmoins sans, me semble t'il, faire trop ma mijaurée. L'une des raisons était que j'avais pour partenaires une brochette de sexagénaires persuadés, comme le critique de théâtre que je suis,  que l'art de l'acteur puisse faire l'effet d'une potion galvanisante Mais le principal motif pour lequel j'ai répondu par l'affirmative est que je savais que le maître d'oeuvre du spectacle n'est pas seulement un bonhomme attentif, bien disposé, ennemi du kitsch émotionnel, amateur d'un théâtre en rupture avec les conventions scéniques mais surtout un artiste, qui, comme ses grands ainés Michel Piccoli, Jean-Louis Trintignant, Bruno Cremer... trouve sa raison d'être, son Eldorado lorsque lui échoit un rôle qui permet à son esprit de cabrioler, à sa sensibilité de jaillir.

Si je continue à écrire des articles pour adoucir le cours du temps qui court au galop, j'ai découvert qu'en interprétant un mec de mon âge  qui vit son présent comme un état de grâce j'ai eu le bol de goûter un jalon ignoré de la vie.
Salle Arletty Palais Belle Ile en mer

vendredi 25 mai 2012

Les quatre jumelles de Copi

Il est clair que Jean-Michel Rabeux qui met en scène Les Quatre jumelles de Copi est aussi partisan que ce dernier de la radicalité artistique. Avides de frasques et adorant s'exploser avec des substances illicites les personnages apparaissent dès leur surgissement d'une sorte de terrier  où ils semblent avoir goûté de noirs délices comme des énergumènes aux identités sexuelles incertaines et aux liens familiaux on ne peut plus fantaisistes

Si la mort couve tout au long de la représentation, elle n'est jamais définitive. Une jumelle sur qui l'héroïne a fait son effet ou qui a reçu une balle dans le buffet  s'écroule, reste sans vie puis se remet sur pied. La rationalité chez Copi a pris la tangente. Ses seuls maîtres sont, à n'en pas douter, les surréalistes que débectent toute situation porteuse de sens.C'est pourquoi cet esprit épris de strass, de paillettes, de vaudeville, de cabaret mais aussi de tragique reste sans postérité.

L'excellence burlesque de Claude Degliame dont les partenaires Georges Edmond, Marc Merigot et Christophe Sauger sont au diapason et dont le langage de charretier fait plier de rire ou donne des envies de fuite rendent ce spectacle parfaitement étranger aux modes et aux courants

Jusqu'au 23 juin Théâtre de la Bastille tel 01 43 5742 14