jeudi 19 novembre 2009

Les affaires sont les affaires d'Octave Mirbeau

On pouvait s'interroger sur la nécessité de monter aujourd'hui cette pièce sentant la naphtaline écrite à la croisée des 19e et 20e siècle par Octave Mirbeau. On ne tarde pas à être édifié. Isidore Lechat, puissant patron de presse devant lequel ses "associés" affectent une attitude révérencieuse est, comme les princes qui aujourd'hui nous gouvernent, partisan d'une modernisation forcenée de la société. Quitte à laisser un nombre croisant de citoyens sur le carreau. Mais cet homme gonflé d'assurance et blindé de thunes qui se vante, comme l'insinuent certains de nos hommes politiques, de n'avoir jamais ouvert un livre, sera terrassé par la mort inopinée du seul être qui lui était cher.
Le couple qu'il forme avec sa femme (Claude Mathieu impeccable) n'est que la juxtaposition de deux solitudes tandis qu'il n'a jamais prêté la moindre attention à sa fille qui, comme la Nora de La maison de poupée d'Ibsen, n'aura d'autre choix, pour sauver sa peau, que de se rebeller et de devenir ainsi un exemple d'émancipation féminine.
Un peu empesé dans la première partie, la mise en scène de Marc Paquien acquiert au fil de l'action de plus en plus de tonus. Une scène est même un pur joyau qui voit s'affronter un Lechat, amateur féroce de manipulations à un marquis désargenté qui défend les valeurs devenues obsolètes du monde duquel il est issu. Parce que ce spectacle nous tend un miroir peu reluisant de la société qu'est devenue la nôtre et que le décor en dit long sur les goûts des nouveaux riches, cette plongée dans un monde sans pitié ne manque pas d'intérêt. Même si l'on préfére voir Marc Paquien s'affronter à des auteurs à l'univers plus singuliers tels que Witkiewicz ou Martin Crimp.
Jusqu'au 3 janvier Théâtre du Vieux-Colombier tel 01 44 39 87 00

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