samedi 22 novembre 2008

l'ancien et le récent

Rien à priori ne rapproche Le voyage de monsieur Perrichon d'Eugène Labiche, comédie partiellement chantée aux effets de vaudeville à Nous étions jeunes alors de Frédéric Sonntag, auteur dramatique âgé de trente ans.  Les deux pièces ont pourtant en commun d'être emblématiques de leur époque respective. Dans la pièce de Labiche deux amis en pincent pour la même mignonne Henriettte ( Hélène Babu), fille d'un marchand qui s'est décidé à faire en famille un voyage en Suisse. Manifestant que l'âge tendre peut être coriace, les deux prétendants leur file le train. Le premier sauvera la vie du  père Perrichon qui s'était aventuré dans une région escarpée, le second s'arrangera pour que le même Perrichon vienne à son secours quand il tombe dans une crevasse d'une profondeur réduite. Le commerçant marque très vite sa préférence pour celui qui lui a donné l'occasion de montrer son courage et manifeste  peu de sympathie à celui qui lui est venu en aide et l'a donc surpris alors qu'il se trouvait en danger.

Julie Brochen qui a mis en scène cette oeuvre de répertoire et s'était déjà,il y a quelques années, atttaqué avec brio à La cagnotte du même Labiche, semble douée - alors qu'elle marque généralement son penchant  pour des créations  plus ardues -  pour monter des oeuvres dont l' efficacité comique est le trait principal. Si le casting mérite un coup de chapeau collectif , on louera en particulier la prestation de Piere Vial qui reprend de savoureuse manière  la partition de haute volée  où s'étaient successivement illustrés Jacques Charron et Jean Le Poulain. Véritable mise en pièce d'une petite bourgeoisie où la fille,malgré le goût qu'elle a pour un des deux garçons qui la convoitent,  laisse ces parents choisir celui qui la conduira à l'autel, Le voyage de monsieur Perrichon en dit long sur l'esprit qui régnait dans la France du XXe siècle. 

Nous étions jeune alors de Frédéric Sonntag décrit le lieu de chaos qu'est aujourd'hui devenu le monde. Conscients que le ce monde menace notre intériorité, un garçon et deux filles laissés sur le bas- côté de la route, quittent la grande ville pour rejoindre une maison au coeur de la forêt  où ils ont le sentiment de retrouver des saveurs  d'enfance. Mais ils ne tardent pas à déchanter. L'ennui qui les envahi une fois qu'ils se sont barricadés les pousse  à se camer et à s'identifier aux personnages de fiction des films d'antan dont ils font une consommation excessive. Pour ne pas perdre la tête ils n'ont d'autres solutions que de retourner vers la métropole qu'ils  ont fuit. Si on regrette l'utilisation trop intensive de la vidéo et surtout  qu'il s'agisse d'une pièce chorale où les personnages sont peu dessinés, il faut reconnaître que cette pièce est une critique on ne peut plus féroce de notre désastreux début de millénaire.  (Le voyage de monsieur Perrichon Vieux Colombier jusqu'au 11 janvier, Nous étions jeunes alors Théâtre ouvert jusqu'au 13 décembre)     

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